Communiqué / Alerte presse


Première lumière de 4MOST, le cosmographe nouvelle génération

le 21 octobre 2025

Plus de dix ans que ce projet astrophysique de grande envergure mobilise le CRAL et voici qu'il vient de franchir une étape décisive... Le 18 octobre 2025, l’instrument 4MOST, installé au Chili sur le télescope VISTA de l’Observatoire européen austral (ESO), a obtenu sa première lumière. Ce premier rayon de lumière venu de l’espace et analysé par les spectrographes de l’instrument marque le début d’une grande aventure d’étude et de cartographie du ciel : grâce à sa technologie de pointe, 4MOST peut étudier la lumière de 2400 objets célestes simultanément ; et cela tous les quarts d’heure.

Un instrument pour cartographier l’Univers à une vitesse record

Le 18 octobre 2025, l’instrument 4MOST (4-Metre Multi-Object Spectroscopic Telescope), installé sur le télescope VISTA de l’Observatoire européen austral (ESO) dans le désert d’Atacama au Chili, a obtenu sa première lumière sur le ciel (fig. 1). Cette étape cruciale dans la vie des instruments astrophysiques marque le début de son aventure scientifique. Cette première lumière n’est pas une simple image de l’espace : 4MOST enregistre des spectres, c’est-à-dire qu’il capture la lumière des objets célestes dans toutes les longueurs d’onde — les couleurs — de l’ultraviolet à l’infrarouge. Il peut ainsi, grâce à des fibres optiques indépendantes, observer simultanément 2436 objets célestes dans 18000 longueurs d’onde.

Une fois l’instrument totalement opérationnel, les trois spectrographes de 4MOST permettront aux astronomes d’étudier en détail de nombreux champs de recherche : composition des étoiles ; formation et évolution des systèmes planétaires ; histoire passée de notre Voie Lactée ; galaxies lointaines ; trous noirs ; origine des éléments chimiques ; matière noire et énergie sombre ; etc. En analysant les spectres de milliers d’objets toutes les 10 à 20 minutes, les chercheurs et les chercheuses pourront cataloguer les températures, compositions chimiques, déplacements et distances de dizaines de millions d’astres dans le ciel de l’hémisphère Sud.

En développement depuis 2010 et prévu pour être opérationnel au moins quinze ans, 4MOST est le plus grand spectrographe multi-objets de l’hémisphère Sud. Sa combinaison de large champ de vue (cinq fois plus grand que la Lune), son nombre de sources simultanées et le niveau de détail de ses spectres en font un instrument unique au monde qui promet de nombreuses découvertes.
 

Le télescope VISTA
Le télescope VISTA - Le télescope VISTA - Allar Saviauk / AIP

Figure 1 : Le télescope VISTA sur lequel est installé l’instrument 4MOST. Image : Allar Saviauk / AIP  


Une importante contribution lyonnaise

La France et le CNRS ont joué une part importante dans le développement de cet instrument européen : deux de ses trois spectrographes ont été réalisés par le CRAL, le Centre de recherche astrophysique de Lyon (CNRS/UCBL/ENS de Lyon) de l’observatoire de Lyon.

Ces deux spectrographes identiques dits « de basse résolution » (LRS en anglais pour Low Resolution Spectrograph) sont essentiels dans la mission de relevé céleste de 4MOST en assurant une couverture continue des longueurs d’onde entre 370 et 950 nm. Le troisième, dit de « haute résolution », peut faire des spectres plus détaillés dans trois bandes spectrales plus étroites. Ces spectrographes, reliés chacun à 812 fibres optiques de l’épaisseur d’un cheveu, permettront de réaliser de grands sondages du ciel, faisant de VISTA — avec son miroir de 4 mètres — le plus grand télescope au monde dédié à ce type de recherche (fig. 2).

 

Schéma de l'instrument 4MOST
Schéma de l'instrument 4MOST - Schéma de l'instrument 4MOST - Consortium 4MOST

Figure 2 : Schéma des principaux composants de l’instrument 4MOST sur le télescope VISTA. La lumière collectée par le miroir est transmise aux trois spectrographes (un dit de « haute résolution » et deux dits de « basse résolution ») par un système de fibres optiques pouvant se placer sur des sources astrophysiques précises. Image : Consortium 4MOST

L’équipe française du CRAL regroupe une quinzaine d’ingénieurs, de techniciens et de chercheurs qui ont participé depuis 2014 à la conception, à l’assemblage et aux tests des spectrographes jusqu’à leur mise en place sur le télescope cet été. « 4MOST a été une aventure humaine et technique exceptionnelle, témoigne Florence Laurent, ingénieure en optique au CRAL. Porté par des équipes internationales aux talents complémentaires réparties sur plusieurs sites, ce projet illustre la puissance d’un effort collectif uni par une ambition commune : la science. » L’instrument est attendu avec impatience par toute la communauté astrophysique comme l’explique Johan Richard, astronome au CRAL : « Il va décupler notre capacité à cartographier de grandes régions du ciel. La quantité de mesures physiques que l’on va obtenir sur des objets aussi distants est vraiment impressionnante ! ».
 

Une première lumière pleine de promesses

La première lumière de 4MOST montre tout le potentiel de l’instrument, capable d’observer un large champ tout en pouvant analyser individuellement et en détail des milliers d’objets astronomiques variés (fig. 3).

L’objet le plus remarquable de ces premières observations est la galaxie du Sculpteur (NGC253), la plus grande du ciel austral après les deux nuages de Magellan. Son diamètre apparent équivaut à celui de la Lune mais sa luminosité plus ténue la rend beaucoup moins visible. Découverte par Caroline Herschel en 1783, elle se trouve à 11,5 millions d’années-lumière de nous et produit de nombreuses nouvelles étoiles.

Un autre objet visible sur les premières observations de 4MOST est l’amas globulaire NGC288, un groupe très dense d’environ 100000 étoiles situé en périphérie de notre galaxie. Il s’est formé il y a plus de 13 milliards d’années, au tout début de l’histoire de la Voie Lactée, ce qui se traduit par des étoiles pauvres en éléments chimiques plus lourds que l’hydrogène ou l’hélium.
 

Région du ciel observé par 4MOST
Région du ciel observé par 4MOST - Région du ciel observé par 4MOST - Harshwardhan Pathak

Figure 3 : La région ciblée pour les premières observations de 4MOST comprend la galaxie du Sculpteur (à droite) et l’amas globulaire NGC288, un groupe dense d’environ 100 000 étoiles situé en périphérie de notre galaxie (à gauche). Image : Harshwardhan Pathak
 

Ces deux objets ne sont pas les seuls à avoir été étudiés lors de cette première lumière scientifique : les spectres de plus de 2000 autres sources ont aussi été analysés (fig. 4). Parmi celles-ci, des étoiles de notre galaxie dont on connait maintenant la température, la masse, le diamètre, la vélocité, l’âge et la composition chimique. Plus loin de nous, 4MOST a réalisé (toujours simultanément) les spectres de plus de 100 galaxies, distantes jusqu’à 10 milliards d’années-lumière (fig. 5). Ces mesures ont renseigné les scientifiques sur leur distance, leur mouvement, leur évolution et leurs trous noirs centraux.
 

Première lumière scientifique de 4MOST
Première lumière scientifique de 4MOST - Première lumière scientifique de 4MOST

Figure 4 : La première lumière scientifique de 4MOST. Les lignes bleues dessinent les limites du champ de vue de l’instrument. Chaque point représente un objet céleste dont la lumière a été captée par les fibres optiques de l’instrument et dont le spectre a été analysé. Les couleurs des points représentent les types d’objets : en vert, les galaxies en arrière-plan ; en rouge, les nébuleuses planétaires ; en jaune les étoiles brillantes ; etc. Un spectre a été obtenu pour chacun de ces points. Leur analyse permet d’avoir des informations sur la température, la composition, la vitesse, la masse ou encore la distance de ces objets. Deux exemples de spectre aux profils différents illustrent l’image. Celui issu de l’amas globulaire, par exemple, montre que ses étoiles sont pauvres en beaucoup d’éléments chimiques, ce qui indique une formation très ancienne. Image : R. de Jong / AIP ; J.-K. / CRAL ; image de fond : H. Pathak / Telescope Live

Spectre d'un AGN
Spectre d'un AGN - Spectre d'un AGN - Roelof de Jong / AIP ; Jens-Kristian Krogager / CRAL ; image de fond : Harshwardhan Pathak / Telescope Live

Figure 5 : Un des plus de 2000 spectres de la première lumière de 4MOST superposé à une image de la région du ciel d’où il provient. Ce spectre, mesuré en pointant une des fibres optiques de l’instrument sur une galaxie en arrière-plan, montre une morphologie typique d’un noyau actif de galaxie (AGN, en anglais) lié à la présence d’un trou noir massif.
Image : Roelof de Jong / AIP ; Jens-Kristian Krogager / CRAL ; image de fond : Harshwardhan Pathak / Telescope Live

 

Plus de 700 personnes venant d’universités et d’organismes de recherche du monde entier travailleront avec 4MOST. 25 programmes scientifiques sont déjà en place pour les cinq prochaines années — dont deux programmes dirigés par des chercheurs du CRAL — et impliquent plusieurs unités de recherche du CNRS.

Retrouvez ce communiqué de presse avec ses contacts scientifiques sur le site du CNRS en cliquant ici.
English press releases here :  ESO ; AIP ; ESO Blog ; CAM Warw.
 

Découvrez 4MOST et ses premiers résultats en vidéo

Retrouvez, ci-dessous, une sélection de vidéo pour retracer l'histoire de 4MOST, de sa conception à sa première lumière en passant par son transport sur les routes sinueuses du désert d'Atacama. Commençons par un retour en arrière : en 2022, nous avions filmé l'un des deux spectrographe basse résolution (LRS) juste avant qu'il ne quitte l'observatoire de Lyon pour Postdam. Johan Richard, astrophysicien au CRAL, avait profité que son boitier soit retiré pour présenter le fonctionnement général de l'instrument.

Trois ans plus tard, ce LRS, comme les deux autres spectrographes, ont été livré au Chili, prêts à être installés sur le télescope VISTA. Allar Saviauk (AIP) a documenté le transport final de 4MOST dans une vidéo que vous pouvez retrouver ci-dessous pour vivre l'installation de l'instrument comme si vous y étiez.

Une fois 4MOST installé, branché et opérationnel, Roelof de Jong (AIP) a interviewé Johan Richard dans le dôme du télescope pour présenter l'instrument en place et ses objectifs scientifiques, quelques jours avant qu'il n'obtienne sa première lumière scientifique...

...première lumière que voici en image :


Image de miniature : B. Tafreshi / ESO.

Publié le 20 octobre 2025 Mis à jour le 21 octobre 2025